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Titre :La Charlotte prie Notre-Dame un soir de réveillon (1)
Compositeur(s) et-ou auteur(s) :Rictus, Jehan
Interprète(s) :Demoy, René
Genre :Diction : théâtre
Fichier audio :
Photo(s) :Photo
Support d'enregistrement :Disque
Format :25 cm aiguille (enregistrement électrique)
Marque de fabrique, label :Pyral zinc – Geistige betreuung Stalag IV C - Wistritz – Studios d'enregistrement
Instruments :Déclamation, diction, monologue
Vitesse (tours/minute) :78
Matériel employé au transfert :Stanton 150, SME-Clément, pointe 4,0ET sur Shure M44, Elberg MD12 : courbe US30, Cedar X declick
Date du transfert :20-06-2020
Commentaires :Texte du contenu ci-dessous. Collection Elie Jean Pascaud, Loïc Pinçon, Sonia Moreira, versée aux Archives nationales. Sur ces disques du Stalag IV C, voir : https://phonobase.hypotheses.org/289
Texte du contenu :La Charlotte prie Notre-Dame le soir de réveillon

Jehan Rictus

Seigneur Jésus, je pense à Vous
Ça m' prend comme ça, y a pas d'offense
J' suis morte de froid, je n' tiens plus d'bout
Ce soir encore j'ai pas eu d' chance

Ce soir, pardi ! c'est réveillon
On n' voit passer qu' des rigoleurs
J' gueulerais "Au feu !" ou "Au voleur !"
Personne y f'rait même attention
Et vous aussi, Vierge Marie
Sainte Vierge, mère de Dieu
Vous pourriez croire que j' vous oublie
Ayez pitié du haut des Cieux

J' suis là, Sainte Vierge, à mon coin d' rue
Où d'puis l'apéro, j' bats d' la s'melle
J' suis qu'une ordure, une fille perdue
C'est "La Charlotte" qu'on m'appelle
Vierge Marie, pleine de grâce
J' suis fauchée à mort, vous l' savez
Mes poignets c'est plus qu'une crevasse
Et me v'là ce soir su' l' pavé

Sûr qu'avant d' vous causer première
Une femme qu'est plus bas que l' ruisseau
Devrait conobrer ses prières
Mais y n' m'en revient qu' des p'tits morceaux
N'est-ce pas que vous êtes pas fâchée
Qu'une fille d'amour pleine de péchés
Vous cause ce soir à sa manière
Pour vous expliquer ses misères ?

Dites-moi que vous n'êtes pas fâchée
C'est vrai que j'ai quitté d' chez nous
Mais c'était qu' la dèche et les coups
La doche à crans, l' dabe toujours saoul
Les frangins déjà affranchis
C'était un vrai enfer, Sainte Vierge
Soit dit sans être une effrontée
Vous-même y seriez pas restée

Enfin, je suis dégringolée
Souvent on m'a mise à l'hosto
Et j' m'ai tant battue et soûlée
Que j'en suis pleine de coups d' couteaux
Eh ben, c'est pas du boniment
C'est vrai, je vous l' jure, Vierge Marie
Malgré comme ça qu' j'aie fait la vie
J'ai pensé à vous bien souvent

J' revois vot' belle robe bleue, vot' voile
Même qu'il était piqué d'étoiles
Vot' belle couronne d'or sur la tête
Et votre trésor sur les bras
Pour sûr que vous étiez jolie !
Comme une reine, comme un miroir
Et c'est vrai que j' vous r'vois ce soir
Avec mes yeux de gosseline

C'est comme si j'y étais, parole !
Seulement, c'est plus comme à l'école
Ces pauvres calots, ce soir, Madame
Y sont rougis et pleins de larmes
Aussi, si vous vouliez, Sainte Vierge,
Faire ce soir quelque chose pour moi
En vous souv'nant de ce temps-là
Où j'étais pas une impie
Vous n'avez qu'à lever le p'tit doigt
Et n' pas vous occuper du reste

J' vous d'mande pas des choses pas honnêtes
Faites seulement que j' trouve et ramasse
Un porte-monnaie avec galette
Perdu pas un d' ces muf' qui passent
À moi plutôt qu'au balayeur
Un porte-lasagne, Vierge Marie,
N'y aurait-y d'dans qu'un larantqué
Ça suffirait pour m'aller planquer
Ça m' permettrait d'attendre à demain
Et d' m'enfoncer dix ronds d' boudin

Ou alors, si vous pouvez pas
Ou voulez pas, Vierge Marie
Vous allez m' trouver ben hardie
Mais faites-moi de suite sauter l' pas
Et puis, emmenez-moi avec vous
Prenez-moi dans le paradis
Ousqu'y fait chaud, ousqu'y fait doux
Où plus jamais je n' f'rai la vie

Ah! emmenez-moi, dites, emmenez-moi
Je n'en peux plus de grelotter
Tenez, allumez mes mains gercées
Et mes p'tits souliers découverts
J' n'ai toujours qu' mon costume d'été
Qu' j'ai fait teindre en noir pour l'hiver
Ah! Emmenez-moi, dites, emmenez-moi
Avant qu' la nuit soit passée
Et que j' sois encore ramassée
Sainte Vierge, emmenez-moi, j' vous en prie !

Et comme y doit y avoir du ch'min
Si des fois vous vous sentiez lasse
Vierge Marie, pleine de grâce
De porter à bras not' Seigneur
Un enfant, c'est lourd à la fin
Vous me l' repass'rez un moment
Et moi, je l' port'rai à mon tour
Sans le laisser tomber par terre
Comme je faisais chez mes parents
La p'tite maman dans les faubourgs
Quand j' trimballais mes petits frères


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